L’EMDR et les vieux cons de la psychanalyse – Emmanuel Deun psychologue à Nice

L’EMDR (Intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires, en bon français) est à la mode. De nombreux témoignages de patients accréditent l’idée que cette technique de psychothérapie est pertinente dans la prise en charge des syndromes post-traumatiques. Personnellement, j’ai ma petite technique bien à moi dans ce genre de situations, elle n’est l’objet d’aucune mode mais je sais qu’elle a changé la vie de quelques patients, ce qui n’est pas si mal. Et si l’EMDR donne de bon résultats, on ne peut que s’en réjouir. Seulement voila… l’EMDR, selon moi, c’est parfait pour les névrosés mais beaucoup, beaucoup plus risqué pour les psychotiques.

Ah mais, j’oubliais, peut-être certains d’entre vous, même parmi les professionnels, ne savent pas exactement ce que recouvrent les concepts de névrose et de psychose ? Il est vrai que ces structures psychiques ont été découvertes et théorisées par la psychanalyse et que la psychanalyse, en institution, on n’en veut plus. D’ailleurs, les classifications officielles des maladies mentales, qu’il s’agisse du DSM ou de la CIM, ont gommé toute référence à la psychanalyse et proposent des définitions des pathologies fondées sur l’observation des symptômes. C’est vieux de plusieurs décennies, la psychanalyse s’est fait foutre dehors de la psychiatrie et il n’y a pas forcément matière à pleurer sur le sort des psychanalystes. En France, Lacan et ses disciples ont à peu près tout fait pour que cela arrive et à force de regarder avec mépris la pharmacie, le comportementalisme, le cognitivisme et les neuro-sciences, ça devait arriver.

Le problème, selon moi, c’est que les repères cliniques issus de la psychanalyse et, en particulier, les deux piliers théoriques que sont les concepts de névrose et de psychose, sont extrêmement pertinents. Pour tout dire, en ce qui me concerne, ils sont ma boussole. La psychose, dont la caractéristique essentielle est la possibilité de perte de contact avec la réalité, est une structure dans laquelle le patient a parfois la nécessité de créer des mécanismes de défense que l’on appelle des néo-réalités. Comme par exemple les délires ou les hallucinations.

J’ai constaté avec désolation que sur des personnes psychotiques, l’EMDR avait constitué ou renforcé des certitudes délirantes, des hallucinations, des faux souvenirs et que ceux-ci sont dramatiquement préjudiciables aux patients.

À ce titre, je déplore vraiment que le savoir de base psychanalytique se délite à ce point car ce délitement peut provoquer un usage vraiment inopportun de l’EMDR, quand il n’est pas tout simplement maltraitant.

Alors si vous croisez en institution un vieux con de la psychanalyse, qui parle de névrose, de psychose, d’hystérie, bref, qui prononce quelques mots faisant référence à Freud et à son héritage, ne le disqualifiez pas trop vite. La psychologie n’est pertinente que quand elle est intégrative et il serait bien dommage de la priver de sa branche la plus ancienne. Y compris quand on pratique l’EMDR.

Emmanuel Deun – Psychologue à Nice – Contact